En dehors de S.O.S Amitié, l’écoute avance aussi !

Le nombre d’appels a encore augmenté et nous avons aussi beaucoup recruté pour faire face à cette augmentation.

2023 nous a aussi montré que nous n’étions pas les seuls à nous soucier de la place et de l’importance grandissante de l’écoute dans la société.

Cette année, l’écoute a trouvé tout particulièrement sa place dans le secteur de la justice, dans la prise en charge des personnes victimes de violences sexuelles et dans la pratique médicale.

La justice restaurative, trouver l’apaisement par le dialogue

Le film de Jeanne Herry “Je verrai toujours vos visages “, sorti en mars 2023, présente la justice restaurative, une pratique complémentaire au traitement pénal, axée sur la réparation du lien social et la prévention de la récidive.

Proche d’un documentaire, il suit les différentes sessions d’un groupe de parole : chacun tour à tour s’exprime, s’explique, s’affronte, parfois se tait, sur ce qu’il a vécu ou réalisé, pendant que les autres écoutent. Au bout de ces échanges, beaucoup y trouveront la réparation, la réconciliation et peut-être la compréhension de la souffrance des uns et de la culpabilité des autres.
À ce titre, il ne faut pas manquer le premier quart d’heure du film qui suit la formation des bénévoles.

La description faite de l’écoute par le formateur résonne tout particulièrement avec l’écoute S.O.S Amitié : «On ne sait pas mieux qu’eux, ni ce qu’ils ne sont ni ce qu’ils devraient faire. On ne parle pas à leur place. On ne suggère rien, on n’essaye pas de les transformer : on écoute, on accueille…inconditionnellement. Si vous leur laissez de l’espace pour réfléchir, ils vont réfléchir. Sinon ils diront encore ce qu’ils ont déjà dit à tout le monde. Et ils tairont encore ce qu’ils ont toujours tu.»

L’écoute des victimes

La commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (CIVIISE) établit le même constat [1] : “Nous ne savions pas que des femmes et des hommes pouvaient parcourir des centaines de kilomètres pour écouter et pour peut-être prendre la parole.”

La commission souligne que l’enjeu du recueil des paroles dépasse le cadre de l’individualité : “Nous ne savions pas que la société répondrait en écho à cette parole en l’écoutant, en la respectant et en la soutenant.”

La médecine et l’écoute

Avec le manque de personnel soignant dans les hôpitaux publics et le manque de médecins en ville ou à la campagne, les médecins n’ont plus la possibilité de prendre du temps d’écoute pour leurs patients. Pourtant, certains praticiens se battent pour accorder plus de place à l’empathie lors des consultations. Ils font la promotion d’un temps pour une écoute qui ne sert pas directement le diagnostic, mais qui vise à la libre expression du patient avec confidentialité et non-jugement.

Jusqu’à la psychiatrie

Signe des temps, ce souci d’écoute se retrouvait au cœur des 9es rencontres en psychiatrie [3] qui avait pour thème en 2023 : “«Je vous écoute… » : Comment recevoir la parole du patient ?”. Certains des ateliers ou des conférences semblent tout droit sortis de notre association : «Ce qu’écouter veut dire…» ou « Enfin, on m’écoute ! »

Deux termes que l’on retrouve dans notre charte d’écoute. Le professeur Serge Perrot, chef de service au centre de la douleur de l’hôpital Cochin, à Paris, se bat pour changer cette approche [4] : «Apprendre à écouter le patient autrement, c’est apprendre à ne pas le couper», explique-t-il. «Si on le laisse parler plus librement et qu’on écoute son récit comme un roman d’aventures, c’est déjà passionnant. Et nous apprendrons beaucoup de choses qu’on n’aurait pas entendues si l’on était resté dans une écoute très médicale».

Est-ce à dire que les entretiens médicaux sont trop formatés ? «Oui, sans aucun doute», assure Serge Perrot. «À la faculté de médecine, on nous apprend d’abord à écouter les antécédents médicaux, l’histoire de la maladie. On passe souvent à côté de beaucoup de choses avec un tel interrogatoire.»

Le Monde se faisait récemment l’écho de la médecine narrative issue directement de ce constat de l’importance de l’écoute et de l’empathie dans la relation médecin/patient.

S.O.S Amitié Paris Île-de-France forme de futurs médecines à l’écoute

C’est sans doute cette attention à l’empathie du médecin et à l’écoute du patient qui explique le partenariat entre la faculté de médecine La Sorbonne Université et S.O.S Amitié Paris Île-de-France. Nos écoutants vont cette année scolaire 2023-2024 sensibiliser à l’écoute tous les étudiants de 2eme année de médecine de cette faculté dans nos centres franciliens. Ce n’est pas une formation théorique en amphithéâtre ou par l’analyse de texte : elle se fait avec les écoutants en confrontation avec des situations réelles d’écoute. Ils y découvrent la diversité des appelants et des situations évoquées. Ils ressortent en général très impressionnés par cette sensibilisation.

Notre objectif 2024 : plus que jamais, continuer à promouvoir l’écoute

En 2024 nous continuerons nos écoutes, toujours 24h/24, 7j/7, tous les jours de l’année, de façon inconditionnelle, anonyme et gratuite. La demande est en effet toujours plus forte : en 2023, 10 % d’appels de plus qu’en 2022 sont arrivés sur notre plateforme téléphonique.

Mais nous allons aussi continuer à développer nos relations avec d’autres institutions autour de l’écoute comme nous l’avons fait pour la sensibilisation des étudiants en médecine : deux étudiants en psychologie vont faire leur stage cette année dans nos postes d’écoute en effectuant le même nombre d’heures d’écoute que nos bénévoles.

S.O.S Amitié France signera aussi en 2024 un partenariat avec l’administration pénitentiaire pour que notre numéro d’écoute soit accessible aux détenus.

Enfin, conscients que l’écoute est un maillon certes fondamental mais insuffisant pour répondre à la souffrance psychique ou pour prévenir le suicide, nous continuerons, avec d’autres partenaires, de promouvoir l’idée d’une Grande Cause Nationale consacrée à l’importance du lien social pour notre santé mentale. Nous avons publié à cet effet en juillet 2023, une tribune dans les colonnes du journal Le Monde [5]. Nous continuerons ce travail tout au long de l’année 2024 où nous espérons pourvoir présenter ce projet de Grande Cause Nationale au Ministère de la Santé.

Sources :

[1] Conclusions intermédiaires CIIVISE
https://www.ciivise.fr/wp-content/uploads/2022/03/CCl-inter_2803_compressed.pdf
[2] France Inter : « Apprendre à écouter le patient » : des ateliers pour mieux former les médecins à l’empathie
https://www.radiofrance.fr/franceinter/apprendre-a-ecouter-le-patient-des-ateliers-pour-mieux-former-les-medecins-a-l-empathie-9276960
[3] 9es rencontres en psychiatrie : « Je vous écoute… » : comment recevoir la parole du patient ?
https://rencontressoignantesenpsychiatrie.fr/
[4] S.O.S Amitié Paris Île-de-France : Acteurs majeurs de la santé mentale, nous appelons à faire du lien social une grande cause nationale
https://www.sosamitieidf.asso.fr/lien-social_grande-cause-nationale/
[5] Journée Nationale de la Prévention du Suicide : JNPS 2024 – Lien social et prévention partagée : comprendre, entretenir, recréer
https://www.unps.fr/jnps-2024-lien-social-et-prevention-partagee-comprendre-entretenir-recreer-_r_126.html